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Plan de Réparation Historique de l’Épargne des Argentins: Un nouveau point de départ ou un blanchiment déguisé?
Le gouvernement argentin a annoncé un ensemble de mesures qui promettent de changer les règles du jeu: (i) réduction de la bureaucratie; (ii) plus de confidentialité; (iii) avantages fiscaux; (iv) simplification administrative; et (v) un nouveau régime fiscal numérique, afin de garantir le droit à la libre disposition de l’épargne privée.
Dans un contexte de stabilité économique, ces mesures visent à encourager l’intégration des fonds issus de l’économie informelle dans le système financier officiel.
Phases de mise en œuvre
La mise en œuvre de ces mesures se déroulera en deux étapes:
- Première étape (immédiate): par décrets émis par le Pouvoir Exécutif National, complétés par des réglementations spécifiques émises conjointement par le ministère de l’Économie, l’Agence de Recouvrement et de Contrôle Douanier (ARCA) et la Banque Centrale de la République Argentine (BCRA). Parallèlement, l’Unité d’Information Financière (UIF) devra adapter sa réglementation au nouveau régime.
- Deuxième étape (législative): soumission d’un projet de loi visant à réformer la Loi Pénale Fiscale et la Loi de Procédure Fiscale, afin de renforcer ce nouveau régime juridique face à d’éventuels changements de gouvernement et de protéger les contribuables.
Mesures principales du Plan
1. Abrogation des régimes déclaratifs: Plusieurs dispositifs par lesquels les commerces, banques et professionnels devaient déclarer des opérations à l’ARCA seront supprimés:
a) Cartes et portefeuilles virtuels: les dépenses personnelles ne seront plus déclarées.
b) Croisement Informatique des Transactions Importantes (CITI) et Code d’Offre de Transfert de biens Immobiliers (COTI): les notaires et agents immobiliers ne devront plus déclarer les transactions à l’ARCA.
c) Achat-vente de véhicules d’occasion: les concessionnaires seront exonérés de déclaration.
d) Charges de copropriété: les administrateurs ne devront plus signaler les paiements mensuels.
e) Services publics: les entreprises d’électricité, de gaz, d’eau et de télécommunications ne transmettront plus les données de consommation de leurs clients.
Les mesures adoptées impliquent davantage de privacité pour tous les citoyens (y compris les entreprises) et une moindre exposition vis-à-vis du fisc.
2. Interdiction des exigences fiscales bancaires: Les banques ne pourront plus exiger que les déclarations fiscales nationales soient une condition nécessaires à la réalisation des opérations. En cas de litige, une plainte pourra être déposée auprès de la Défense du Consommateur.
3. Mise à jour des seuils de déclaration des opérations: À partir du 1er juin, les seuils pour déclarer des opérations financières seront rehausser de manière significative:
- Virements ou accréditations: (i) 50 millions de pesos argentins (ARS) pour les personnes physiques; (ii) 30 millions ARS pour les personnes morales.
- Retraits en espèces: 10 millions ARS pour les personnes physiques et morales.
- Soldes bancaires en fin de mois: (i) 50 millions ARS pour les personnes physiques; (ii) 30 millions ARS pour les personnes morales.
- Dépôts à terme et avoirs des Agents de Liquidation et de Compensation (ALyCs) auprès des sociétés de bourse: (i) 100 millions ARS pour les personnes physiques; (ii) 30 millions ARS pour les personnes morales.
- Achats des consommateurs finaux: 10 millions ARS pour les personnes physiques et morales. Il sera possible de réaliser des achats jusqu’à 10 millions d’ARS sans obligation de déclaration d’information supplémentaire.
Modernisation fiscale et financière
4. Régime simplifié de l’impôt sur le revenu: Un nouveau système de déclaration de l’impôt sur le revenu pour les personnes physiques et les successions indivises résidentes est mis en place.
- Basé uniquement sur la facturation et les dépenses déductibles, sans tenir compte des dépenses personnelles ni de la variation patrimoniale.
- Les contribuables pourront adhérer au nouveau régime simplifié de l’impôt sur le revenu ainsi qu’ à la clôture de l’exercice fiscal. L’ARCA proposera un montant à payer pour la période fiscale 2025.
- En mai 2026, le contribuable qui aura adhéré disposera du montant de l’impôt sur le revenu que lui proposera ARCA sur son site officiel afin qu’il procède au paiement. Il pourra l’accepter, le régler, ou le rectifier en fonction des données fournies.
- Ce nouveau système automatisera la saisie des données, et permettra une vérification individuelle de la part du contribuable.
- L’ARCA n’exigera plus des «petits contribuables» qu’ils remplissent des formulaires complexes comme doivent le faire les «grands contribuables».
5. Mesures complémentaires de la Banque Centrale: La BCRA mettra en œuvre un système de “Finance Ouverte” (Open Finance). Qu’est-ce que cela signifie?:
a) Réduction de la bureaucratie et facilitation de l’accès aux produits financiers.
b) Les individus disposeront de leurs informations financières, et la BCRA définira des paramètres sécurisés afin de garantir la sécurité du partage de leurs informations. Les personnes souhaitant obtenir un crédit ou d’autres produits bancaires pourront autoriser les établissements financiers à analyser leurs revenus et leurs dépenses en un clic.
S’agit-il d’un blanchiment déguisé?
Techniquement non. Le gouvernement présente cette initiative comme un changement de régime, un nouveau départ. Cependant, s’il a quatre pattes, une queue et qu’il aboie, cela reste un chien — peu importe son nom. Dans les faits, ce Plan ouvre la possibilité de régulariser sans pénalités ni coûts, et même sans déclarations patrimoniales spécifiques, des fonds informels.
Cela laisse une impression mitigée: il semble que, faute de pouvoir lutter contre l’évasion fiscale, l’État baisse les bras et autorise l’usage libre de fonds non déclarés.
La vraie question est de savoir si cette mesure est motivée par une conviction politique ou par la nécessité de relancer l’économie nationale.
Aspects juridiques clés
En pratique, il s’agit d’une nouvelle opportunité pour les contribuables d’intégrer au système formel leurs économies conservées «sous le matelas».
Cependant, il s’agit pour l’instant d’un pari risqué. La validité de ce nouveau régime dépendra des autres pouvoirs de l’État (le Congrès National et le Pouvoir Judiciaire), et sera également influencée par les élections législatives d’octobre.
C’est un changement qui bouleverse les règles, mais que le Pouvoir Exécutif ne peut garantir seul sans risque pour les contribuables. Tant que les lois en vigueur ne sont pas modifiées, un contribuable utilisant ses économies informelles s’expose à une enquête de l’ARCA. Cela n’aura peut-être pas lieu sous l’administration actuelle, mais nul ne peut prévoir ce qu’il adviendra dans deux ans.
À cela s’ajoute la spéculation selon laquelle le projet inclurait une réduction des délais de prescription en matière de procédure fiscale. Ce changement pourrait offrir davantage de sécurité aux contribuables pour utiliser leur épargne non intégrée au marché formel. Toutefois, compte tenu des majorités actuelles dans les deux chambres, rien ne garantit que le Congrès national adopte un projet de loi en ce sens.
Conclusions
Bien que ces propositions paraissent éloignées des standards établis par les organismes internationaux, le gouvernement a précisé qu’il continuera de respecter les engagements en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et la prolifération des armes de destruction massive.
Ce respect des engagements internationaux, notamment vis-à-vis du FMI, est essentiel. Mais la vraie difficulté réside dans l’exécution : comment distinguer, dans la pratique, un trafiquant, un terroriste ou un proxénète, d’un simple contribuable ayant omis de déclarer certaines ventes?
Le véritable défi sera donc l’application effective de ces mesures. Tant que l’ensemble de la réglementation n’est pas publié au Bulletin Officiel, il est impossible d’en évaluer pleinement la portée et les risques.
Si vous souhaitez discuter de cette question avec les avocats de Wiener Soto Caparros, n’hésitez pas à contacter notre auteur.
Clause de non-responsabilité
Cet article est basé sur des informations accessibles au public et n’a qu’une valeur informative. Il n’a pas pour objet de fournir un avis juridique ou une analyse exhaustive des questions qu’il mentionne.
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